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Biodiversité fonctionnelle et services rendus à l’humain

La biodiversité, autrement dit la diversité du Vivant, a été grandement impactée par les modifications des pratiques agricoles après la Seconde Guerre Mondiale. Cependant, la biodiversité dite fonctionnelle rend aux humains de nombreux services écosystémiques qui nous permettent d’exister. Cet article vous explique ce qu’est un service écosystémique et vous donne des exemples à travers les infrastructures agroécologiques, suivi de quelques conseils pour agir à votre échelle !  

Des pratiques agricoles responsables du déclin de la biodiversité 

Suite à la Seconde Guerre Mondiale, l’agriculture conventionnelle a été progressivement mise en place notamment dans les pays Occidentaux où elle est devenue la norme en raison de la forte demande des consommateurs. C’est ce mode de production qui est majoritairement responsable du déclin de la diversité du Vivant (biodiversité). Cela est lié à certaines pratiques agricoles (utilisation de produits chimiques, travail profond du sol, uniformisation des cultures, utilisation de machines agricoles lourdes et gourmandes en énergie fossile, déforestation, agrandissement des parcelles au détriment des petites fermes) et à la philosophie d’après-guerre (productivité, rendement, surconsommation, industrialisation, mécanisation) [5].  

Il est aujourd’hui temps de (re)passer à une agriculture qui nous permette de répondre aux besoins des humains tout en respectant le Vivant. Des synergies sont possibles entre Agriculture et Biodiversité !

Les infrastructures agroécologiques et les services écosystémiques 

Les infrastructures agroécologiques (IA) sont des aménagements dérivés de l’agroécologie, une agriculture qui vise à promouvoir des systèmes alimentaires viables respectueux des hommes et de leur environnement. Celle-ci se distingue de l’agriculture conventionnelle1 et de l’agriculture biologique2.

D’après le dictionnaire de l’agroécologie [1] que je vous invite à parcourir, une infrastructure agroécologique correspond à :

« tout habitat d’un  agroécosystème3 dans ou autour duquel se développe une végétation spontanée ou d’un couvert semé mais non récolté ».

Ces IAE sont classées en 3 catégories (linéaire, ponctuelle, surfacique) et procurent des services écosystémiques2 bénéfiques aux êtres vivants, dont les humains. La biodiversité qui trouve refuge au sein de ces IAE rend elle-même des services écosystémiques. On parle de biodiversité fonctionnelle.  

Un exemple : Un arbre en bordure de champs est une IAE qui limite l’érosion du sol. Si cet arbre est une espèce mellifère5 c’est aussi une source de nourriture pour les pollinisateurs qui à leur tour rendent un service, celui de la pollinisation des cultures à proximité.

Les services écosystémiques sont eux même classés en 3 catégories :

  • Les services d’approvisionnement : production de nourriture, d’eau douce potable, de ressources énergétiques et de fibres
  • Les services de régulation : maintien de la qualité de l’air et de l’eau, dégradation des pollutions, limitation de l’érosion du sol, tampon face aux risques naturels, régulation des ravageurs de cultures et des maladies
  • Les services culturels : dimensions esthétique, spirituelle, éducative et récréative, source d’inspiration (ex : biomimétisme)

Pour mieux comprendre voici une liste non exhaustive d’infrastructures agroécologiques et les services qu’elles rendent :

  • Mare/cours d’eau avec des plantes aquatiques: réservoir de biodiversité, zone tampon en cas d’inondation, source d’eau, purification de l’eau
  • Arbre isolé/bosquet/ripisylve6 : amélioration de la structure du sol, lutte contre l’érosion, source d’ombre, lieu de passage pour la faune
  • Prairie inondable/friche : zone tampon en cas d’inondation, réservoir de biodiversité, stock de carbone
  • Bande enherbée/bande fleurie/haies : source alimentaire pour la biodiversité dont les auxiliaires de culture, lieu de passage pour la faune, zone de nidification

Pour que les services écosystémiques soient rendus à l’humain, il faut laisser de la place à la Nature, cesser l’artificialisation des sols qui accentue les inondations par exemple. Ceci est d’autant plus important dans un contexte de dérèglement climatique, engendrant des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes et intenses.

Où implanter ces IA ?

Les IAE peuvent être implantées partout (bord de route, fossé, talus, cimetière, jardin, parcs urbains,…), pas besoin d’être agriculteur !

L’important n’est pas de multiplier les aménagements, mais de constituer des réseaux.  Pour mieux comprendre cette affirmation je vous invite à lire l’article du Tote Bag sur les continuités écologiques que l’on appelle aussi les trames vertes (pour la végétation) et bleues (pour les milieux aquatiques).

Un autre mot clé : c’est la diversité. En effet, la diversité est synonyme de résilience et mettre en place différentes infrastructures agroécologiques permet de répondre aux différents besoins des espèces locales.

Que faire à notre échelle ?

  • Implanter des IAE dans nos jardins (construire une mare, planter un arbre, planter une diversité de fleur avec des floraisons étalées dans le temps) ;
  • Ne pas utiliser de produits chimiques ;
  • Laisser des espaces sauvages dans votre jardin avec une fauche tardive (en automne) ;
  • Acheter des produits issus d’une agriculture responsable (certification Haute Valeur Environnementale, certification Agriculture Biologique, label Bee Friendly,…). Le mieux reste de privilégier les circuits courts pour rencontrer directement les agriculteurs et échanger avec eux au sujet de leurs pratiques ;
  • Lire les articles du Tote Bag « les corridors écologique » [2] et « comment aider les pollinisateurs de nos jardins » [3] pour en savoir plus ;
  • Ecouter la conférence de Nature en Occitanie pour transformer son jardin en Oasis de Biodiversité [4] (même si on n’a pas de jardin !)

Lexique 

1Agriculture conventionnelle = agriculture majoritaire suite à la Seconde Guerre Mondiale notamment dans les pays Occidentaux

2Agriculture biologique =  mode de production qui s’inscrit dans le processus de transition agroécologique. Agriculture qui tente de répondre aux enjeux alimentaires et environnementaux actuels en intégrant des principes de l’agroécologie qui visent à maintenir une alimentation durable et de qualité.

3Agroécosystème = écosystèmes cultivés, correspondant généralement à l’unité spatiale qu’est l’exploitation agricole 

4Services écosystémiques = biens et services que les hommes peuvent tirer des écosystèmes, directement ou indirectement, pour assurer leur bien-être (nourriture, qualité de l’eau, paysages,…).

5Méllifère = dit d’une plante dont le nectar est récolté par les abeilles pour élaborer le miel

6Ripisylves = formations végétales (boisées, herbacées ou buissonnantes) qui se développent sur les rives/bords des cours d’eau, des rivières ou des fleuves.

Pour aller plus loin vous pouvez jeter un coup d’œil dans les ressources de la bibliographie 

[1] sd, INRAe, Dictionnaire d’Agroécologique, disponible en ligne sur https://dicoagroecologie.fr/

[2] 2021,  Natacha RACINAIS, Le Tote Bag,  Article Les corridors écologiques, disponible en ligne sur  https://www.letotebag.net/ecologie/comprendre-lecologie/les-corridors-ecologiques/

[3] 2021, Natacha RACINAIS, Le Tote Bag,  Article Comment aider les pollinisateurs de nos jardins ?, disponible en ligne sur https://www.letotebag.net/ecologie/comment-aider-les-pollinisateurs-de-nos-jardins/

[4] 2021, Nature en Occitanie, Conférence Faire de son jardin un oasis de biodiversité,  disponible en ligne sur https://www.youtube.com/watch?v=T7RfenItc1k

[5] 2012, Livre Agriculture et biodiversité : Valoriser les synergies, Editions Quae

Mathilde Antoine