Life on Mars(eille) : 9 danseurs, un été, une autre planète
Des coulisses aux calanques, bienvenue dans la vie des danseuses et danseurs de (LA) HORDE, la troupe du Ballet National de Marseille.
Acclamés sur la scène internationale et sollicités par des icônes telles que Madonna et Sam Smith pour chorégraphier leurs tournées, ces artistes ne cessent de surprendre et de susciter l’engouement.
Depuis leur prise de direction du Ballet national de Marseille en 2019, Marine Brutti, Jonathan Debrouwer et Arthur Harel, accompagnés de leurs danseurs et danseuses, ont su imposer leur style unique, faisant de (LA) HORDE un pilier de la danse contemporaine en France.
Leur message queer, révolté, et leur esthétique novatrice remplissent les salles à chaque représentation, faisant d’eux un phénomène incontournable.
Mais qui se cache derrière cette troupe frondeuse en perpétuelle effervescence ?
La série documentaire Life on Mars(eille), disponible sur France TV, lève le voile sur ces artistes qui se donnent corps et âme pour le Ballet. Sur fond de musique électro, Nathan, Jonatan, Joao, Isaïa, Elena, Alida, Izzak, Amyn, et Myrto partagent leurs réflexions sur leur rapport à la scène, au corps, à leur sexualité, à la troupe, et surtout, à Marseille, ville qu’ils affectionnent tant.
Plutôt que de vous décrire cette série que j’ai finie en moins de deux heures, je vais vous donner trois raisons pour lesquelles vous devriez la regarder.
1. Une bouffée d’air frais dans un climat social et politique anxiogène
La Horde incarne une philosophie de vie rafraîchissante, véritable remède à l’anxiété sociale ambiante alimentée par la montée de l’extrême droite, et porte un message politique fort.
Venus des quatre coins du monde avec leurs croyances et cultures, les danseuses et danseurs de (LA) HORDE proposent une autre façon de vivre ensemble. Leur énergie est électrisante, leurs paroles apaisantes, et leur conception de faire société désirable.
La danse, pour eux, est une exploration collective et tolérante, une manière de repousser les limites des conventions classiques.
On les voit vivre, s’aimer, danser « no matter what », faisant fi des conventions. Des aliens sans genre ni religion qui ont fait de Marseille leur cocon.
Ce collectif interroge la portée politique de la danse et cartographie les formes chorégraphiques de soulèvement populaire, des raves aux danses traditionnelles.
Le documentaire (LA) HORDE Révolte à Marseille, se concentrant davantage sur les coulisses des spectacles a quant à lui été déprogrammé de France 5, France TV invoquant la période de réserve électorale. Cette décision reflète la menace de censure qui commence à s’attaquer au service public et montre la tension autour d’un message engagé que les danseurs souhaitent intégrer à leurs spectacles.
La troupe ne se contente donc pas d’être une simple fenêtre sur notre époque; elle ouvre une perspective vers l’extérieur, vers un futur possible, sur Mars(eille) et pourquoi pas au-delà.
2. L’ivresse de (LA) HORDE
Notre corps, c’est notre âme, on s’embrasse, on se jette les uns sur les autres, on se bat, on s’entraide… On est une bande inséparable. Et Marseille, c’est notre terrain de jeu.
Chaque danseur.se de (LA) HORDE entretient un rapport unique avec la danse, ce qui constitue la force du collectif. Dans Life on Mars(eille), on découvre des électrons libres qui se réunissent autour d’une création commune. Leur diversité et la richesse de leurs histoires personnelles nourrissent un style de danse inclassable où le classique côtoie la danse urbaine comme le voguing et le krump.
La série est aussi l’occasion pour ces danseuses et danseurs de sonder leur rapport au collectif. Tous sont venus avec le même rêve : marquer le monde de la danse, le changer, le révolutionner et se dédier entièrement à ce projet. Mais ce rêve ne peut être accompli qu’à plusieurs.
« L’univers de La Horde est très intime, physique. Il y a de l’amour, de la rage”. La danse est le moyen d’exulter leurs émotions ensemble.
Ils en viennent aussi à explorer les peurs et les doutes qui les traversent : Comment concilier leurs ambitions et donc la nécessité de devoir partir un jour avec ce sentiment d’attachement à une famille, la famille de la danse ?
Une partie de moi espère qu’on restera jeunes à jamais ensemble.
Et puis vient leur rapport au public. Ils témoignent l’excitation de se retrouver sur scène, de faire connexion avec la salle. Le sentiment électrisant que cela procure et qui les transcende (celleux qui ont déjà éprouvé la scène s’y reconnaîtront). Cette sensation unique, c’est ça qui les anime et les unie, envers et contre tout.
3. La beauté des images (et des corps)
Dès les premières minutes de la série, un plan-séquence magnifie les corps sveltes des danseurs, sublimés par les rayons du soleil marseillais. Derrière la caméra, Raphaël Chatelain, photographe et réalisateur habitué à capturer la communauté LGBTQIA+, met en valeur l’androgynie et la beauté des corps qui se libèrent des standards traditionnels. Les danseurs explorent leur part de féminité et de masculinité, nous rappelant que leur corps est le reflet de leur âme. Des corps en mouvement, des corps qui explorent, qui exultent, et des corps qui s’enlacent. Sur scène ou au bord de la mer.
Avec cinq épisodes de 20 minutes, Life on Mars(eille) s’impose comme un témoignage vibrant où la danse se mêle à une philosophie de vie audacieuse. Une série rafraichissante pour cet été, qui peut-être vous donnera envie de découvrir les spectacles des (LA) HORDE, de danser et/ou de vous installer à Marseille 🙂