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Le Printemps en 4 tableaux

Nous fêtions la semaine dernière l’arrivée du printemps, le mercredi 21 mars. Même si la crise climatique actuelle tend à effacer les saisons, en peinture, ce concept est bel et bien présent. Qui mieux que David Hockney, Claude Monet ou Rosa Bonheur pour personnifier, illustrer et réinventer le printemps. Par cette sélection de quatre tableaux, je vous propose de découvrir mon printemps. Je vous propose de célébrer à nouveau le bourgeonnement des fleurs, les couleurs nouvelles et le soleil. 

The arrival of Spring, iPad painting n°180, David Hockney, 2020.

David Hockney est un artiste aux multiples facettes : peintre, dessinateur, décorateur, graveur, écrivain. Il est passé par à peu près tous les médiums lors de sa longue carrière. Né en Angleterre en 1937, il voyage à Paris, aux États-Unis et sa réputation se construit. Sa peinture se construit elle aussi. Son style est d’abord structuré, géométrique, réaliste puis se meut vers des formes plus abstraites, arrondies et désorganisées. Ce qui reste, ce qui perdure et ce qui transcende, c’est la couleur. Qu’il a toujours abondamment utilisé. Le travail de Hockney est tel qu’il faudrait des milliers d’articles pour tout évoquer. Ce qui nous intéresse aujourd’hui est son regard sur le printemps. Il y a effectivement eu un élément déclencheur à son amour pour lui, ou plutôt deux. La Normandie, et le confinement.

Le printemps de Hockney est une saison vive et multicolore. Le bleu du fond est éclatant et les différentes teintes de vert, agrémentées de rouge, nous rappelle toutes les nuances de la saison. Le confinement en Normandie a été une inspiration énorme pour l’artiste qui a expérimenté de nouvelles techniques de production artistique. La peinture sur iPad offre en effet de nombreuses opportunités de texture, de forme, de nuance…

Son travail sur le printemps a été tel qu’il a réalisé une énorme fresque pour le musée de l’Orangerie de Paris dans laquelle il a considérablement agrandie ses dessins pour donner à voir cette saison éclatante de couleur.

David Hockney, The arrival of Spring, 2021 Print © MyArtBroker

La liseuse, Claude Monet, 1872.

Chez Monet, 100 ans plus tôt, le printemps est plus doux. Claude Monet est un artiste important de la scène artistique du XIXe et XXe siècle en France. L’artiste naît en 1840 à Paris néanmoins, il grandit loin de la capitale, en Normandie. Il y retourne en 1859 pour se former en peinture et côtoie des grands noms d’alors dont Renoir. En voyage à Londres il découvre la virtuosité des couleurs de Turner. Il peint des chefs d’oeuvres bien connus aujourd’hui dont Impression soleil levant ou Les Nymphéas, fresque conservée à l’Orangerie. Monet est considéré comme le maître de la couleur par excellence.

Le tableau La liseuse représente une femme en train de lire, affalée sur un sol d’herbe et de fleurs. On ressent ici toute l’énergie printanière : le calme, les fleurs, les éclats du soleil. La tenue blanche de la liseuse est traditionnelle et les nuances de rose la rende vivante. Contrairement à Hockney, Monet utilise des couleurs pâles. On retrouve néanmoins l’aspect texturé et flou lié ici à l’impressionnisme.

Claude Monet, La liseuse, 1872 © Image libre de droit

Repos du bétail, 1885, Rosa Bonheur.

Rosa Bonheur est une peintresse marquante du XIXe siècle. Née à Bordeaux en 1822, elle se forme à l’art avec son père, lui-même professeur de dessin. Il l’a très tôt encouragée à développer son talent, ne croyant pas à l’infériorité de ses aptitudes sous prétexte qu’elle serait une femme. Elle suit des cours au Louvre et se perfectionne. Dans sa vingtaine, elle expose de nombreuses toiles au Salon et reçoit des commandes du gouvernement français devenant alors une artiste prospère et respectée.

Cette toile de 1885 représente des taureaux se reposant sur un plateau rempli d’herbe et de petites fleurs colorées. Le ciel est gris à gauche et plus clair à droite. On distingue d’ailleurs une montagne entre les nuages. Comme chez Monet, les tons sont pâles. Le style naturaliste nous permet ici d’apprécier plus de détails, de nuances, de textures. Le printemps chez Bonheur, ce sont les vaches. Les vaches si subtilement peintes, qui, au retour des beaux jours, peuvent à nouveau se reposer hors de l’étable. Le réalisme des animaux est une obsession chez la peintresse’ et une obsession chez les naturalistes en général. Elle s’est entourée d’anomaux toute sa vie et les a peints dans tous les environnements afin d’atteindre ce réalisme scientifique. Anatomique.

Toute sa vie, Rosa Bonheur a vécue seule. En totale indépendance, notamment financière. Son éducation et son tempérament ont fait d’elle une femme libre dans un siècle qui n’encourageait pas l’indépendance des femmes. C’est ça aussi le printemps. Ce vent de liberté.

Mary Cassatt, Repos du bétail, 1885 © Anaë Leffray

Mère et enfant, Mary Cassatt, 1905.

Mary Cassatt naît aux États-Unis en 1844 dans une famille fortunée qui ne l’encourage pas dans sa vocation artistique. Pourtant , à 22 ans, elle quitte son pays pour s’expatrier en France et rejoindre le groupe des impressionnistes. Elle participe à quatre de leurs salons et est grandement considérée dans leur groupe. Peintresse féministe, elle a participé à la bataille pour le droit de vote aux États-Unis. Dans son travail, elle s’attachait à représenter des scènes modernes du quotidien, sublimées par son utilisation extraordinaire de la couleur. Dans cette oeuvre de 1905, Cassatt se réapproprie un thème important de l’art chrétien : la Vierge à l’Enfant, la représentation de la maternité, thème longtemps réservé aux hommes.

Ce portrait représente une femme habitée de jaune, avec une chevelure rousse coiffée en chignon tenant sur ses genoux un.e enfant nu.e. La maternité est devenu un des thèmes de prédilection de l’artiste après la mort de sa soeur. Les modèles sont aussi.e.s sur une chaise et se regardant dans un miroir tenu par l’enfant. La robe de la femme possède une énorme fleur de tournesols côté gauche. Les drapés sont finement exécutés et les nuances de couleur sont éclatantes. Cette oeuvre est bien sûr printanière par ses couleurs. Le jaune, lever. Mais aussi le rouge rosé qui réchauffe les teintes des visages.

Mary Cassatt, Mère et enfant, 1905, huile sur toile © Anaë Leffray

Le printemps est une saison complète et complexe. Premiers bourgeonnements, sortie de dépression hivernale, rayons de soleil qui commencent à réchauffer notre peau. Que ce soit avec les tons vifs de David Hockney très récemment ou avec de douces nuances chez les impressionnistes, le printemps a toujours grandement inspiré les artistes. Les productions sont innombrables par leur quantité et inestimables par leur qualité. Elle continuent en tout cas de nous faire vibrer tout au long de cette belle saison.