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« Nous, les Leroy », grandir avec Florent Bernard

Florent Bernard livre ici son premier long-métrage après de très longues et belles années à nous faire rire avec les sketchs de Golden Moustache puis l’inratable podcast « Le Floodcast ». C’est un film émouvant qui nous emmène sur la route des souvenirs d’une famille en quête d’union, famille dans laquelle on retrouve tous un peu de nous.

Un film de famille : de l’importance de la nourriture pour poisson et des messages sur le répondeur

Dans une ouverture de film digne de la célèbre introduction du film Là-haut de Pixar, Florent Bernard arrive à nous montrer vingt ans d’un couple. De Sandrine (Charlotte Gainsbourg) et Christophe (José Garcia) on n’entend au départ que les voix, qui nous laissent voir des personnages drôles, tendres, amoureux. Leurs posters punaisés aux murs, les tags à la bombe noire, les lettres et les messages téléphoniques nous font tout de suite entrer dans leur monde, dans leur couple. On assiste à leur évolution en quelques minutes, à leur nouvelle vie de famille, la naissance de leurs enfants, la mort de leur chat.

Chaque personnage nous est présenté, avec ses frustrations et ses peurs. Les relations au sein de la famille sont en péril, l’équilibre est au bord de l’implosion. Ce sont ces relations familiales complexes qu’illustre ici Florent Bernard, de mère et père à enfants, de frère et sœur, de couple. Comment tout cela tient ? Par quoi ? Le film nous rappelle qu’une famille ça n’est pas un assemblage de souvenirs mais aussi des efforts constants pour créer des moments et du partage.

Sans tomber dans les stéréotypes, Florent Bernard construit ses personnages de façon intelligente, au travers de métaphores et de parallèles que l’on voit à l’écran, comme la souffrance internalisée de la mère, Sandrine, montrée dans l’explosion de boissons à plusieurs moments.

L’attachement que nous éprouvons pour les quatre protagonistes, Sandrine, Christophe et leurs deux enfants Bastien (Hadrien Heaulme) et Loreleï (Lily Aubry) se construit au fil du film de manières distinctes. Si le personnage de Christophe est celui qui est le plus difficile à appréhender et à apprécier, Florent Bernard livre également le portrait du « père », patriarche par de nombreuses facettes. Il y a ici une critique de la violence parfois sinueuse, parfois explosive et de l’absence de communication, souvent marquée dans la figure paternelle.

La demande d’amour parfois culpabilisante de la mère, parce qu’elle a peur de ne pas être aimée et d’être une mauvaise mère, est aussi un thème qui revient dans le film. Les relations de frère et sœur, qui existent à la fois en tant qu’individu et en tant que fratrie sont finement décomposées. On peut retrouver des traits de chaque famille, des moments poignants traduits en mots et en images dans le film. C’est là d’une grande force.

Un film américain à la française ?

L’amour de Florent Bernard pour Judd Apatow (Funny People, The 40-Year Old Virgin, Knocked Up, etc… ) est bien connu par celles et ceux qui ont pu écouter le Floodcast ou assister à des séances de cinéma commentées par le réalisateur. Les influences du réalisateur se sentent effectivement dans le film, qui conserve tout de même une touche bien spécifique et une vraie volonté de faire une comédie française.

On retrouve par exemple Judd Apatow dans l’univers du film, car c’est dans un monde très urbain, composé de pavillons et de zones commerciales que nous plonge Florent Bernard. La scène très touchante des deux enfants et du père de la famille dans une concession de voitures puis sur un parking évoque ainsi des références états-uniennes. Les grandes zones bétonnées, l’ennui urbain, la distance provoquée par des difficultés à communiquer… Florent Bernard arrive à faire de ces thèmes que l’on a déjà pu voir ailleurs quelque chose de personnel, avec des dialogues très bien pensés et qui font mouche, que cela soit par l’humour ou l’émotion.

De plus on sent l’envie de la part du réalisateur de livrer quelque chose de français, qui mette en avant des personnes souvent laissées de côté dans une France périphérique. Il le fait notamment au travers de la bande originale, musique populaire française durant tout le long de son film, ce qui est rare. Chaque chanson est choisie avec soin, illustrant les scènes par les paroles et l’ambiance des morceaux. La culture populaire française, sa musique, ses espaces, est ainsi mise en lumière durant tout le film.

Le premier film de Florent Bernard : un film d’amis et d’amitiés

Florent Bernard est aussi connu en France sous le pseudonyme de Flobert. Flobert, c’est l’une des plus grandes chaînes Youtube de comédie française pendant les années 2010. Flobert, c’est aussi l’un des plus gros podcasts français, le Floodcast, coanimé par Adrien Ménielle. Ce dernier joue un personnage secondaire dans Nous, les Leroy, comme Justine Le Pottier, comme Jérôme Niel, Simon Astier, Vincent Tirel, Baptiste Lecaplain… Des personnes que l’on a pu suivre depuis de nombreuses années sur internet, sur les planches, que l’on voit avec bonheur sur le grand écran. C’est un film bourré d’amitiés, où les personnages secondaires brillent par leur construction, leur humour et leur interprétation.

Nous, les Leroy donne la sensation de retrouver une bande de copains, une bande avec qui on a grandi. Ce premier film illustre également l’admiration et l’affection qu’ont beaucoup de fans de la première heure du Floodcast et de Golden Moustache pour Florent Bernard, qui réalise, avec son long-métrage, un de ses rêves.