L’agroforesterie pour lutter contre les changements climatiques
Nous savons tous plus ou moins que l’agriculture, et notamment l’élevage et la déforestation induite, est responsable d’une part importante des émissions de gaz à effet de serre. Ces émissions provoquent une accumulation de ces gaz (en particulier le CO2 et le méthane) dans l’atmosphère, rendant notre planète de moins en moins habitable. Et si l’agriculture pouvait stocker plus de carbone qu’elle n’en rejette, devenant une solution au problème mondial auquel nous sommes tous confrontés ? L’agroforesterie, une pratique agricole ramenant les arbres dans les parcelles pourrait être une des clés.
L’agroforesterie, quelques définitions
Selon la FAO, les pratiques agroforestières se définissent comme suit : « Systèmes d’utilisation des terres et les pratiques dans lesquelles les plantes ligneuses vivaces sont délibérément intégrées aux cultures agricoles et / ou à l’élevage pour une variété de bénéfices et de services. »
Plus simplement, sur le site du ministère [1], l’agroforesterie correspond à « l’association d’arbres et de cultures ou d’animaux sur une même parcelle ».
Au sein de la même parcelle, l’association d’arbres avec une autre production agricole (que ce soit culture maraichère, grande culture ou élevage) permettra de diversifier les revenus et de viser une « triple performance économique, environnementale et sociale ».
Les exemples de pratiques agroforestières sont très variés et nous viennent de formes anciennes et traditionnelles de polyculture-élevages. Au cours des années 1960, la révolution agricole ou Révolution Verte a uniformisé les paysages, provoquant l’arrachement des haies et des arbres au nom du « remembrement ». Aujourd’hui, la tendance est plutôt à la replantation ! Les études et observations de terrain ont prouvé le rôle crucial de l’arbre dans nos agroécosystèmes : ce dernier enrichit les sols en matière organique, génère des habitats favorables à une biodiversité en déclin, limite les érosions et le ruissellement, crée des microclimats,…et stocke du carbone !
La création de microclimats
La plantation d’arbres ou arbustes au sein d’une parcelle agricole mais aussi de haies peuvent permettre de réguler localement le climat. Les haies sont aussi appelées brise-vents et viennent ainsi en protection des cultures ou des animaux. Elles jouent en quelque sorte un rôle « d’amortisseur climatique » [2] comme l’évoque l’Association française d’agroforesterie. En protégeant contre le vent, les arbres/arbustes limitent l’érosion des sols et les phénomènes d’évaporation, ce qui est essentiel en été. Tous ceux qui possèdent des arbres dans leur jardin savent aussi qu’ils rafraichissent l’atmosphère lors des périodes de forte chaleur !
Bref dans un contexte de réchauffement climatique avec des étés qui seront de plus en plus chauds, opter pour ce genre de solution semble plutôt cohérent…
Des arbres pour séquestrer le carbone
« L’agroforesterie est reconnue comme une activité capable de séquestrer du carbone par l’UNFCCC (United Nations Framework Convention on Climate Change) dans le cadre des mesures de reforestation et de plantation. » [3]
Par quel mécanisme l’arbre peut-il capter le carbone ? Par la photosynthèse, pardi ! Les végétaux fixent le carbone atmosphérique pour synthétiser leur énergie et les éléments nécessaires à leur croissance. Le carbone est ainsi stocké dans les branches, feuilles, systèmes racinaires et tissus ligneux : les arbres représentent donc de véritables machines à capter le CO2 ! Lorsque ceux-ci meurent ou perdent leurs branches, le carbone est restitué au sol et vient enrichir en matière organique ce dernier. Au contraire, la déforestation et les pratiques d’agriculture sur brulis relarguent du carbone dans l’atmosphère.
En France, des études sur une station expérimentale ont par exemple montré que des peupliers stockent en 13 ans environ 540 Kg C/arbre, dans leurs troncs et branches [3].
Le plan « 4 pour 1000 »
L’initiative « 4 pour 1000 » lancée en 2015 à l’occasion de la COP21, « vise à montrer que l’agriculture, et en particulier les sols agricoles, peuvent jouer un rôle crucial pour la sécurité alimentaire et le changement climatique» [4]. Le but étant de recenser les différentes pratiques agricoles permettant de stocker davantage de carbone dans les sols. L’agroforesterie y a donc une place de choix.
Je vous propose une petite vidéo pour mieux comprendre en 3min30 cette initiative « 4 pour 1000 ».
Les sols mondiaux contiennent 2 à 3 fois plus de carbone que l’atmosphère. Augmenter ce carbone de 0,4% par an ou 4 pour 1000, dans les 30-40 premiers centimètres du sol, permettrait de stopper l’augmentation de la quantité de C02 dans l’atmosphère.
L’agroforesterie, en créant de la biomasse, en permettant l’enrichissement des sols en matière organique (MO) et en stockant du carbone, répond ainsi parfaitement à l’objectif « 4 pour 1000 ».
Ainsi, le plan « 4 pour 1000 » propose deux axes d’action :
– Réduire la déforestation qui rejette des GES ;
– Encourager toutes les pratiques agroécologiques telle que l’agroforesterie.
Pour en savoir plus sur cette initiative, rendez-vous sur la page internet où tout est clairement expliqué !
Bon à savoir : Une association française appelée AVOICE, portée par des étudiants en Ecole d’ingénieur en agronomie, entend diffuser la voix des agriculteurs sur la thématique du changement climatique. Si le sujet vous intéresse, allez écouter les podcasts et lire les fiches réalisées à partir des interviews de différents agriculteurs !
Sources
[1] L’agroforesterie, comment ça marche ? Site du ministère. Consulté le 27/09/2021. En ligne, disponible sur : https://agriculture.gouv.fr/lagroforesterie-comment-ca-marche
[2] Association française d’agroforesterie, L’agroforesterie en 12 principes
[3] Xavier Hamon, Christian Dupraz, Fabien Liagre. L’agroforesterie, outil de séquestration du carbone en agriculture, 2009.
[4] L’initiative « 4 pour 1000 ». Consulté le 27/09/2021. En ligne, disponible sur : https://www.4p1000.org/fr
Natacha Racinais