Il y a quelque chose avec cette pochette. Je ne sais pas si ce sont les lumières rouge, bleue et les ombres très marquées, ou si c’est ce décor rocheux, ou encore ce costume de squelette que portent les enfants à Halloween. En tout cas quelque chose m’accroche. Je finis par penser que c’est sûrement ce tout qui, déjà, fait jaillir de l’album une ambiance très personnelle, qui m’attire comme les ampoules d’été attirent les papillons de nuit. Et à ce stade je n’ai encore rien écouté.
Dès le premier titre quelque chose de mystique nous envoûte et nous plonge dans, ce qui deviendra par la suite, un cocon cosy et moelleux dont les murs transpirent la mélancolie. Mais cette mélancolie est si douce, si tendre – presque aussi chaleureuse que le Pale Blue Eyes du Velvet Underground – qu’on lui pardonne sa tristesse afin de l’attraper à bras-le-corps pour mieux l’embrasser.
Les morceaux sont lents et délicats, de leur couleur se dégagent des scènes nocturnes qui pourraient s’apparenter à celles d’une fin de soirée adolescente. Pleine de regrets, de déceptions mais dont les premiers rayons de soleil soulignent à quel point la vie est une incompréhension unique qu’aucune autre sensation ne pourrait remplacer. Ces histoires, ces petites tristesses que l’on pensait terribles autrefois, avec du recul ne comptent-elles pas parmi les plus belles à vivre ?
Le titre Kyoto s’impose – pour un court instant – comme un élan d’espoir. Non pas en termes de paroles mais grâce à son refrain, avec ses envolées de cuivres – qui m’évoquent un lointain souvenir d’Illinois de Sufjan Stevens.
On pourrait reprocher à Kyoto de flirter avec des sonorités plus convenues indie-rock, pour autant il n’est pas en rupture totale avec l’ambiance générale de l’album ; bien au contraire il lui apporte une couleur supplémentaire et, de sa différence, resplendit.
L’album s’achève sur I Know The End, peut-être son morceau le plus touchant à mon sens. Sa progression musicale le pousse lentement vers un bouquet final parfait, une explosion, un cri. Une fin brutale qui résume merveilleusement le ton introspectif à la fois innocent et apocalyptique de l’œuvre.
Pourtant sorti début juin, Punisher s’impose comme l’album de cet hiver. C’est beau, c’est doux, se morfondre jusqu’à la noyade dans sa propre nostalgie et en ressortir assoiffé n’a rarement autant été synonyme de bonheur.
Tristan Grossetti