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Comptes rendus d'expos

L’Abbaye de Fontenay, joyau architectural du XII ème

Figure 1 Vue de l’abbaye © Salomé Legrand

Dans les confins d’une vallée bourguignonne, au bout d’une petite route sinueuse se situe un trésor architectural qui paraît à peine touché par les siècles passés : l’Abbaye cistercienne de Fontenay.
Un début d’article assez rêveur me direz-vous, tout comme la visite de cette abbaye qui semble nous enlever un moment à notre quotidien pour profiter de sa vallée verdoyante, de ses bâtiments frais et clairs et de son silence presque assourdissant.

L’abbaye de Fontenay a été fondée par Bernard de Clairvaux en 1119, un membre très important de l’ordre cistercien qui contribue grandement à sa diffusion au XIIe siècle. L’ordre cistercien prône une grande rigueur dans la pratique religieuse de ses membres et un grand dépouillement, dans la vie de ses moines et moniales tout comme dans l’architecture et le décor des établissements qui les abritent. Il est né en réaction aux « excès » de l’ordre de Cluny et s’en démarque également par l’abandon du concept d’abbaye-mère, en laissant donc une plus large indépendance aux fondations qui voient le jour en Europe.

Figure 2 Vue de la nef principale
de l’abbatiale © Salomé
Legrand

C’est ainsi que, sous l’impulsion de l’abbé de Clairvaux, l’abbaye de Fontenay voit le jour : son nom est lié aux nombreuses sources d’eau se trouvant sur les terres environnantes appartenant à l’entité de l’abbaye puisque les moines faisaient vœu de pauvreté. L’abbaye de Fontenay est consacrée en 1147 par Eugène III et poursuit son activité religieuse jusqu’au XVIIIe siècle. Les moines sont contraints en 1725 de raser le réfectoire puisqu’ils sont en difficulté financière, et en 1789 survient la Révolution qui amène les révolutionnaires à vendre l’abbaye en 1791, après le départ de tous ses membres. Fontenay est alors transformée en papeterie.

Figure 3 Vue des vitraux du
choeur de l’abbatiale ©
Salomé Legrand

En 1820, l’abbaye passe dans les mains de la famille Montgolfier et est achetée en 1906 par Edouard Aynard, d’origine lyonnaise. Entre temps, Fontenay est classée monument historique en 1852. L’arrivée de l’abbaye dans les mains de la famille Aynard signifie la fin de l’activité de papeterie, après plus d’un siècle : Edouard Aynard décide de détruire les infrastructures rajoutées pour retrouver l’aspect médiéval d’origine de Fontenay.

Figure 4 Vue du dortoir et de sa charpente © Salomé
Legrand

Les bâtiments aujourd’hui conservés sont l’abbatiale et le cloître, la forge, la porterie, la boulangerie et le dortoir qui sont tous ouverts à la visite, ainsi que le logis de l’abbé, l’enfermerie, l’infirmerie ou le pigeonnier qui eux sont privés. Certains bâtiments comme le chenil ou le réfectoire ont été détruits au fil des siècles. L’état de conservation général est impressionnant, notamment du fait des restaurations qui sont intervenues depuis l’abandon des activités industrielles et l’inscription de Fontenay au Patrimoine Mondial de l’UNESCO en 1981. L’architecture générale est donc assez dépouillée, en pierre nue avec une ornementation pratiquement absente et des formes architecturales simples.

Lors de ma visite, j’ai été frappée par la monumentalité de l’abbatiale : elle est longue de presque 70 mètres et l’intérieur est aujourd’hui vide, à l’exception de la zone du chœur qui est pavée de carreaux des premiers siècles de l’existence du bâtiment et conserve une statue de Vierge à l’Enfant. Les vitraux ornés de formes géométriques sont doucement colorés et contribuent à l’atmosphère lumineuse assez chaude de l’endroit. La déambulation nous emmène ensuite dans le dortoir par un escalier qui part de l’intérieur de l’abbatiale. Encore une fois, l’immensité de l’espace est impressionnante par le vide qui y règne et nos yeux sont attirés par la charpente. Sa construction est plus tardive et prend la forme d’un large berceau en plein-cintre, illuminé par les fenêtres qui parcourent les parois de la salle.

Figure 5 Vue de l’intérieur du
cloître © Salomé Legrand

Le cœur de la vie monastique était le cloître, conservé à Fontenay dans son état d’origine du XIIe siècle. Il servait à la circulation entre les différentes parties de l’abbaye et forme presque un carré à Fontenay. Encore une fois, l’architecture est très sobre, de pierre nue avec peu d’ornementation mais en y déambulant on peut apercevoir différentes formes de chapiteaux ou de piliers. La luminosité de l’espace est tout aussi impressionnante que celle qui règne dans les autres parties de l’abbaye, comme l’église ou le dortoir.

Figure 7 Vue d’une galerie du cloître © Salomé Legrand

Le dernier point fort de ma visite à Fontenay était la forge : les moines cisterciens de l’abbaye produisaient des objets métalliques grâce aux gisements environnants pour leur usage personnel ou pour la vente, afin de subvenir aux besoins de leur communauté. La forge de Fontenay fonctionnait à l’aide d’un système hydraulique et fait partie des plus anciennes installations de ce type connues en Europe ; un partenariat entre plusieurs lycées européens a permis la reconstitution de la machinerie hydraulique, aujourd’hui en place dans les locaux de l’abbaye. Une fois n’est pas coutume, le bâtiment est monumental et dépouillé, avec une architecture plus fermée et imposante que les autres corps sur le terrain.

Figure 6 Vue du bassin
alimentant la forge © Salomé
Legrand

L’abbaye de Fontenay est donc un monument entretenu de façon remarquable par la même famille depuis plus d’un siècle, qui vaut largement le détour si vos pas vous mènent dans la région de Dijon et de la Bourgogne. La visite est très agréable, surtout en été quand on cherche de la fraicheur, et plus que tout impressionnante par la beauté, le silence et la monumentalité de tous les éléments qui constituent encore aujourd’hui l’abbaye.