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Comprendre (écologie)

Ecoféminisme : mission décodage

Le mouvement écoféministe refait surface dans de nombreux médias. Parfois incompris, souvent critiqué, il est une façon de comprendre les dominations établies par les hommes pendant des décennies. Décodage de ce mot aux contours encore un peu flous…

« Le refus de la prédation ». Sandrine Rousseau, ex-candidate pour la primaire des verts, définit l’écoféminisme par ces mots. C’est la première femme politique française à s’auto-proclamer écoféministe. La première. Et déjà beaucoup critiquée. Le féminisme ok. L’écologie ok. Mais l’écoféminisme ? Ce mot, pourtant apparu dès les années 1970, émerge seulement maintenant dans le vocabulaire courant. Mais sait-on réellement ce que c’est ?

L’écoféminisme se définit par une connexion étroite entre l’écologie et le féminisme. La domination des femmes ainsi que la domination de la nature sont deux combats qui n’en font qu’un. 

Remonter l’Histoire

Pour comprendre l’écoféminisme il faut remonter le cours de l’Histoire. Apparu dès la fin du 19ème siècle en Europe, l’association entre féminisme et écologie explose dans les années 70. La montée des luttes contre le patriarcat en est la principale raison. Les femmes voient alors un lien entre les violences exercées sur elles et celles sur les animaux. Mais l’écoféminisme va prendre un véritable tournant dans les années 80… La raison ? Un contexte politique et climatique de plus en plus tendu. Les luttes anti-nucléaires vont accélérer cette prise de conscience environnementale.

Nucléaire, fin du monde, féminisme … Les combats se multiplient. Et ce sont les femmes qui les mènent avec le plus d’acharnement. Surement parce qu’après des siècles d’oppression, toute forme de domination les révoltent. L’écoféminisme s’est renforcé avec l’ampleur de la crise climatique et des violences sexistes ces dernières années.

Plusieurs façons d’être écoféministe

L’écoféminisme n’est pas une méthode précise. Pas un mode d’emploi. Ce courant de pensée s’exerce de multiples façons. A commencer par la manifestation de plus de 2000 femmes aux Etats-Unis en 1980. De la musique rythmée, des danses entrainantes, des rires par centaines… une légèreté pour combattre une idéologie forte. En Inde, les féministes enlacent des troncs d’arbre. C’est de ce pays que vient Vandana Shiva, célèbre militante, qui permettra au mouvement écoféministe de prendre un nouveau souffle en Europe. En Amérique du Sud, les femmes plantent des arbres autour des villages pour éviter l’érosion. L’écoféminisme occidental est plus académique, celui des pays émergents plus spirituel. Mais le fond reste le même. Ces actions permettent aux femmes de lutter contre la domination des hommes sur la Nature et de fait, sur elles également.

Et les limites ?

Avec le mouvement #metoo, l’écoféminisme prend de l’ampleur dans les médias. Mais cette ampleur apporte son lot de problèmes. Les théories écoféministes sont multiples, les façons de l’exercer aussi. Prônant une ouverture d’esprit par sa diversité de pensées, le modèle écoféministe est confronté à la reprise de certaines idées par certains groupes religieux pour promouvoir leurs idées. L’engouement récent pour ce mouvement entraine la dilution des idées au risque de perdre les fondements premiers de l’écoféminisme – compliqué à comprendre – c’est aujourd’hui ce que l’on entend du mouvement. Compliqué oui, car les définitions sont multiples, mais essentielles. L’écoféminisme est un acte de résistance et c’est ce qu’il faut en retenir. Peut-être rentrera-t-il dans le dictionnaire l’année prochaine ?

Marie Nidiau

Sources 

Article « L’écoféminisme, contre les « dominations croisées » des femmes et de la nature » publié dans le magazine Le Monde le 22 octobre 2021

Thèse « PENSER L’ÉCOFÉMINISME Féminisme de la subsistance et écoféminisme vernaculaire », Geneviève Pruvost.

Article « Ecoféminisme : définition, histoire du mouvement, critiques » publié dans le magazine youmatter le 2 avril 2021

Article « Sandrine Rousseau : « L’écoféminisme, c’est le refus de la prédation » », publié dans le magazine Politis